• Partie 4 - Fuite

    Très bien bâtis physiquement mais bêtes comme leurs pieds, Wyr parvint à convaincre les gardes de la laisser sortir, prétextant une envie pressante. L’un d’eux l’accompagna – alors qu’Awrakel avait bien insisté sur le fait de toujours être en supériorité numérique avec elle. Elle s’enferma à clé, observa tout autour d’elle afin de trouver une issue : il n’y avait pas de fenêtres, simplement un espace ouvert, au dessus, par lequel elle pourrait passer pour s’enfuir. Une seule chose la tracassait : le bruit. Si le garde n’entendait rien d’autre que des sons évoquant le mouvement, il allait probablement se poser des questions. Finalement, elle opta pour la solution « draken » : après s’être mise dans les meilleures conditions possibles – qui consistait à profiter, tout de même, des toilettes pour vider sa vessie –, la jeune créature ouvrit la porte. Presque immédiatement, alors que le garde tournait la tête pour l’avoir dans son champ de vision, Wyr lui asséna un énorme coup de boule et s’assura de sa réussite en l’achevant avec ses cornes. Elle laissa le garde choir à même le sol et ne tarda pas à se jeter en dehors des sanitaires pour rejoindre la sortie – dont elle ne connaissait que trop bien l’emplacement.

    Elle faillit rire du fait qu’aucun garde n’était posté autour du bâtiment : ils s’étaient contentés de rester dans la salle où elle avait été enfermée. Elle ne sut expliquer pourquoi mais elle se sentit obligée de passer devant les vitres de la pièce : elle tira la langue avec provocation, telle une enfant désobéissante, et acheva de les mettre en rogne en leur adressant un très beau geste injurieux des deux mains. Elle vit distinctement certains drakens se jeter hors de la pièce tandis que d’autres continuaient à cligner bêtement des yeux, hébétés.

    Vive et habituée aux terrains escarpés, Wyr quitta définitivement son village sans se retourner. S’il y avait un moyen de quitter Mikros, elle le trouverait probablement dans le plus grand territoire de la planète, où vivait le haut patriarche des drakens.

    Il s’avérait que plusieurs vaisseaux chua, hautement surveillés par ses comparses d’espèce, étaient justement arrêtés là. On en déchargeait d’énormes boîtes rectangulaires qui contenaient probablement des armes diverses et variées. Wyr n’avait jamais vu de chuas de ses propres yeux : ces créatures étaient vraiment très petites et semblaient aussi perverses qu’on le lui avait raconté ! Mais peu importait, elle ne laisserait pas l’opportunité lui filer entre les doigts : attendant le moment propice, la jeune draken se glissa derrière une ligne de cargos, se faufila entre les paquets, s’accrocha à la plateforme qui menait au vaisseau et s’y glissa tandis que chuas et drakens, en contrebas, se dévisageaient. Manque de bol, elle croisa un petit groupement de rongeurs. Presque immédiatement, elle prit une posture beaucoup plus confiante et fit mine d’aller récupérer une boîte, située sur sa gauche. Les petites créatures ne la regardèrent qu’un instant et s’éloignèrent pour descendre sur terre ferme. Wyr s’enfonça dans le vaisseau et chercha un lieu dans lequel se cacher : elle trouva une accès au plafond, parvint à l’ouvrir sans trop de problèmes – le vaisseau était conçu pour des chuas, pas des drakens – et s’y glissa tant bien que mal. Il s’agissait d’une sorte de caisson sécurisé dans lequel pouvait aisément se déplacer un rongeur. Wyr pouvait seulement s’y allonger pour pouvoir passer en hauteur mais ce n’était pas ce qui la gênait le plus : à vrai dire, les explosifs qui l’entouraient avaient quelque chose de bien plus intimidant.

    Wyr ne sut pas dire combien de temps s’était écoulé depuis qu’elle s’était glissée dans sa cachette. Elle était en train de s’assoupir lorsque le vrombissement et les tremblements du vaisseau qui démarrait, amplifiés par la forme et la sonorité du caisson, la firent sursauter, sa tête heurtant douloureusement le plafond sous le mouvement. Néanmoins, elle s’y habitua et finit même par s’endormir... La tête posée sur un paquet d’explosifs.

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